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Deux grandes ères de la persuasion : ce qu’il faut vraiment savoir pour être persuasif

  • Photo du rédacteur: Victor Ferry
    Victor Ferry
  • 25 mars
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 27 mars



Dans cette série sur la prise de parole, on s’attaque à un point fondamental : faire en sorte que vos discours rapportent, plutôt que de vous coûter. La différence est énorme : soit vous stressez pour rien, vous perdez votre temps, vous vous ridiculisez… soit chaque prise de parole devient un levier pour faire avancer votre cause, vendre votre produit ou rallier des gens à votre mouvement.


Et pour ça, il y a un domaine clé à maîtriser : la persuasion.


La persuasion, ce n’est pas juste convaincre


Beaucoup confondent persuasion et conviction. Or, convaincre, c’est agir sur l’opinion. C’est répondre aux objections, argumenter, sourcer ses propos. Persuader, c’est amener les gens à agir, pas juste à être d’accord.


Et pour les pousser à agir, vous avez besoin de techniques qui touchent à la psychologie sociale, aux neurosciences (les vraies, pas celles des coachs auto-proclamés “neuro-trucs”) et surtout… d’un peu d’histoire.



Époque 1 : Aristote et la naissance de la rhétorique



La première grande période de la persuasion, c’est l’Antiquité grecque. Avant Aristote, pas besoin d’apprendre à parler : les décisions venaient soit des chefs, soit des dieux (via des oracles). Mais à partir du moment où Athènes expérimente la démocratie directe, tout change : il faut prendre la parole en public pour influencer le vote.


La prise de parole devient alors une question de vie ou de mort. Socrate en est l’exemple parfait : accusé de corrompre la jeunesse, il est condamné à mort malgré un discours brillant. Pas d’avocat, pas de juré impartial. Juste vous, votre parole, et le public qui tranche.


Dans ce contexte, Aristote développe les fondements de la rhétorique, toujours valables aujourd’hui. Il identifie trois leviers essentiels à activer pour persuader :



Logos – Le discours



Des arguments solides, des faits, des preuves. Ne pas juste “parler bien”, mais donner de bonnes raisons d’agir, avec des éléments concrets, des statistiques, des expériences vérifiables.



Ethos – La crédibilité



Pas dans le sens “j’ai travaillé ma posture et ma voix grave” (bullshit de coach en com’), mais dans le sens “je dis ce que je fais, je fais ce que je dis”. Votre éthique, vos lignes rouges, vos principes doivent guider vos choix. Et c’est cette cohérence qui crée la confiance. Pas besoin d’être lisse, il faut être fiable.



Pathos – L’émotion


Il ne suffit pas de raisonner un public, il faut le toucher. Et pas avec de la comédie ou du storytelling plaqué. Pour que l’émotion fonctionne, elle doit être sincère. Vous devez avoir quelque chose à faire du sujet dont vous parlez. C’est ça qui crée l’impact, pas une larme forcée au bon moment.



Époque 2 : Le retour de la persuasion avec la science



Et ensuite ? Long désert. Entre Aristote et les années 1970-1980, quasiment rien de nouveau sur la persuasion. Certes, il y a de beaux discours (notamment à la Révolution française), mais la théorie ne progresse pas vraiment. Jusqu’à l’apparition des méthodes expérimentales, de la psychologie sociale et des neurosciences.


C’est là qu’on comprend mieux comment fonctionne le cerveau face à un discours.



Le modèle “Système 1 / Système 2”


Popularisé par Kahneman (dans Système 1, système 2), ce modèle montre qu’on a deux façons de penser :


Système 1 : rapide, automatique, basé sur des réflexes, des raccourcis mentaux.

Système 2 : lent, réfléchi, plus coûteux en énergie.


Et la persuasion, c’est souvent d’activer le Système 1 pour que les gens agissent sans trop réfléchir. Par exemple en créant un sentiment d’urgence, en utilisant des biais connus (comme l’effet d’ancrage, la rareté, la preuve sociale…).


Attention : ce n’est pas parce que vous utilisez ces leviers que vous êtes un manipulateur. Tout dépend de ce que vous proposez derrière. Si vous n’avez rien de solide, vous griller votre ethos. Si vous avez des raisons solides d’agir et vous utilisez les bons leviers, vous êtes juste… efficace.



Les leviers de Cialdini



Dans son livre Influence et Manipulation, Robert Cialdini présente les grands leviers psychologiques qui déclenchent l’action :


• La réciprocité

• La rareté

• L’autorité

• La preuve sociale

• L’engagement

• La sympathie

• Etc.


C’est un best-seller du marketing, et une lecture indispensable si vous voulez maîtriser la persuasion moderne.



Le nudge : changer l’environnement, pas les idées



Autre concept récent et puissant : le nudge. L’idée n’est plus de convaincre, ni même de persuader, mais de modifier légèrement le contexte pour influencer le comportement.



Exemples concrets :


• Des assiettes plus petites à la cantine = on mange moins.

• Une mouche dessinée dans les urinoirs = moins de salissures.

• Une offre “intermédiaire” bien calibrée entre “gratuite” et “hors de prix” = on clique là où on veut vous faire cliquer.


Le nudge est très utilisé en marketing, mais aussi… par les États. Et c’est là que ça peut devenir inquiétant. Pousser les gens à certaines décisions “pour leur bien”, sans qu’ils s’en rendent compte, c’est glissant politiquement.



Conclusion : maîtriser l’art de persuader, sans perdre son âme


Vous voulez que vos discours aient de l’impact ? Vous devez agir sur l’opinion, la crédibilité, l’émotion et les biais cognitifs. Mais sans jamais oublier que le fond compte plus que la forme.


La persuasion n’est pas qu’un ensemble de techniques. C’est une stratégie globale qui doit reposer sur :


• Des convictions solides

• Une éthique claire

• Un vrai enthousiasme pour ce que vous défendez

• Et un usage intelligent des biais, des preuves et du contexte


Dans la prochaine vidéo/article, je vous parlerai de la stratégie des 4P, un outil concret pour structurer vos prises de parole selon le moment de votre campagne ou de votre discours. À très vite. Cet article vous a plus? Vous pouvez nous aider à en faire toujours plus en devenant membre de notre association: https://aedci.s2.yapla.com/fr/espace-membres/adhesion/En tant que membre actif, nous vous offrons le droit à une formation gratuite par an à choisir dans ce catalogue. 

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