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Comment parler quand on est acculé : étude de cas Marine Le Pen

  • Photo du rédacteur: Victor Ferry
    Victor Ferry
  • 31 mars
  • 4 min de lecture



La scène est classique, presque rituelle.

Un homme ou une femme politique est rattrapé(e) par une affaire d’argent public, un procès, une condamnation. Cette fois-ci, c’est Marine Le Pen. Trois ans de prison, cinq ans d’inéligibilité.

Et surtout : l’obligation de parler. De s’expliquer. De « garder la face » en direct, au 20h.


Peu importe ce qu’on pense du fond de l’affaire. Ce qui nous intéresse ici, c’est la position rhétorique extrême dans laquelle elle se retrouve. Et ce qu’on peut apprendre de ce genre de situation.


Parce que si vous prenez régulièrement la parole en public, vous aussi, vous serez un jour mis en difficulté. Pris à partie. Questionné sur vos erreurs.

Et dans ces moments-là, la façon dont vous réagissez peut tout changer. Soit vous survivez. Soit vous vous enfoncez.



1. Garder la face (quand vous êtes au bord de craquer)


Si vous êtes attaqué publiquement — sur un plateau, en conférence, ou dans un live — vos émotions sont votre premier ennemi.

Et elles sont traîtresses : elles vous soufflent que vous avez raison, qu’il faut répliquer, se défendre, remettre les pendules à l’heure.

Mais en rhétorique, celui qui « remet les pendules à l’heure » est souvent celui qui perd du temps… et du terrain.


Donc si vous êtes dans une situation où vous vous sentez acculé, évitez :

• De prendre l’attaque personnellement.

• De répondre avec agressivité, ironie ou amertume.

• De laisser voir que vous êtes blessé.


À la place, tentez ça :

• Faites une phrase courte qui reconnaît la difficulté : « Oui, c’est une épreuve. »

• Puis immédiatement, dézoomez : parlez des autres. De ceux que vous représentez. De votre mission. De ce qui compte au-delà de vous.

• Montrez que vous êtes en maîtrise, parce que vous êtes habité par autre chose que votre ego.


C’est ce que Marine Le Pen devrait faire. Ne pas répondre à la journaliste sur le ton de la douleur, mais sur le ton du devoir :

« Je pense à tous ceux qui comptaient sur moi pour 2027. »


Et si elle y arrive, elle sauvera au moins une chose : sa stature.



2. Ne rien dire qui puisse vous enterrer (même si vous avez envie de hurler)


Le piège classique, dans une affaire judiciaire, c’est le réflexe de la défense politique :

« C’est un procès politique ! On veut m’abattre ! La justice est instrumentalisée ! »


Oui, peut-être.

Mais personne ne gagne un procès (ni une présidentielle) avec ce type de défense, surtout quand les faits sont là.

Et surtout, vous donnez à vos adversaires exactement ce qu’ils attendent : une preuve que vous ne respectez pas l’État de droit.

Une occasion rêvée de dire : « Vous voyez bien qu’ils ne sont pas républicains. »


Donc si vous êtes mis en cause, évitez :

• De critiquer les juges, les médias ou « le système ».

• De faire des parallèles avec d’autres affaires.

• De vous victimiser en boucle.


À la place, tentez ça :

• Restez sobre. Une phrase simple, posée :

« Je conteste la sévérité de cette peine. Je fais appel. Je me battrai pour faire valoir ma vérité. »

• Ne dites rien qui pourra être réutilisé contre vous.

• Montrez que vous êtes un adversaire dur, mais loyal.


C’est comme ça qu’on sort d’un procès avec des soutiens renforcés. Pas en jouant le martyr, mais en incarnant une forme de force calme.

Et croyez-moi, cette force-là, elle impressionne.



3. Préparer la relève (avant que le vide ne s’installe)


Le pire effet d’une mise en cause publique, ce n’est pas le choc immédiat.

C’est l’effet d’effondrement. Le moment où les gens vous regardent et se disent :

« Ok, il/elle tombe. Mais qui reste ? Est-ce qu’il y a un pilote dans l’avion ? »


Quand vous êtes à la tête d’un projet, d’un mouvement, ou même d’une équipe, et que vous vacillez, il faut absolument éviter le sentiment de vide.

Pas seulement pour votre image. Mais pour la survie de tout ce que vous avez construit.


Donc si vous êtes dans une situation où vous pourriez devoir passer la main, évitez :

• De jouer les héros solitaires.

• De faire comme si rien ne bougeait.

• De laisser entendre que sans vous, tout s’écroule.


À la place, tentez ça :

• Annoncez que vous avez préparé la suite.

• Valorisez ceux qui peuvent prendre le relais : « Jordan Bardella a déjà prouvé qu’il pouvait assumer. »

• Montrez que ce n’est pas la fin d’un cycle, mais le début d’un passage de témoin.


En clair : transformez la fragilité en démonstration de solidité.

Même affaibli, vous continuez de maîtriser la trajectoire.



En résumé : quand vous êtes acculé, c’est là que vous vous révélez


Une bonne prise de parole, ce n’est pas juste une question de punchlines ou de charisme.

C’est une capacité à garder le cap, même quand tout menace de dérailler.


Et ça, ça se joue sur trois fronts :

1. Garder la face : en parlant avec hauteur, jamais avec colère.

2. Ne pas aggraver son cas : en refusant les provocations, en restant sobre.

3. Préparer l’après : en assumant sa fragilité sans fragiliser l’ensemble.


La bonne nouvelle, c’est que ça s’apprend.

Et chaque fois que vous vous posez ces questions avant de parler — même en petit comité — vous musclez vos réflexes rhétoriques.



Si vous voulez progresser là-dessus, je vous recommande de continuer à vous entraîner.

Regardez les prises de parole en direct. Imaginez que vous êtes à leur place. Demandez-vous : « Qu’est-ce que j’aurais dit ? Qu’est-ce que j’aurais évité ? »


C’est comme ça qu’on devient un orateur solide.

Pas en évitant les situations critiques. Mais en s’y préparant, à chaque fois. Cet article vous a plus? Vous pouvez nous aider à en faire toujours plus en devenant membre de notre association: https://aedci.s2.yapla.com/fr/espace-membres/adhesion/En tant que membre actif, nous vous offrons le droit à une formation gratuite par an à choisir dans ce catalogue. 

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